Aller au contenu

Miracle des Billettes

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

Le Miracle des Billettes est une affaire d'accusation de profanation d'hosties qui aurait occasionné un miracle eucharistique. Il a donné lieu à la construction de la chapelle des Billettes et à la réalisation d'une fenêtre vitrail de l'Église Saint-Étienne-du-Mont à Paris.

Le récit des évènements

[modifier | modifier le code]

Le récit[De qui ?] est qu'en 1290, une femme pauvre emprunte trente sous parisis à un usurier (qui se serait appelé Jonathas[1]) de religion juive de la rue des Jardins en y déposant des habits en gage[2]. N'ayant pas l'argent nécessaire, et souhaitant récupérer ses habits pour Pâques, elle les échange contre l'hostie consacrée de la communion qu'elle avait dissimulée sous sa langue[2].

Jonathas perce ensuite l'hostie à plusieurs reprises[1], ce qui l'aurait fait saigner, et finit par la faire cuire dans un chaudron[2]. L'eau bouillante se serait transformée en bain de sang[1]. Une voisine récupère l'hostie et la rapporte au curé[2]. L'hostie miraculée sera conservée comme une relique dans l'église Saint-Jean-en-Grève jusqu'à la Révolution où elle disparut dans le tumulte[1].

Jonathas aurait été brûlé (il ne paraît toutefois pas certain que l’accusé ait été condamné à mort, certains textes évoquant une conversion[1]), sa femme et ses enfants sont convertis au catholicisme[2]. Leur maison est rasée. En 1295, le pape Boniface VIII autorise la construction d'une chapelle à l'endroit du miracle : la chapelle des Billettes[3].

La seule réalité attestée serait qu’une personne juive, inculpée de profanation d’hostie, a bien été jugée à Paris en 1290[1].

Diffusion et conséquences

[modifier | modifier le code]

Le plus ancien récit des évènements remonte à 1322[1]. L’histoire est largement diffusée, à la fois par des écrits et des représentations iconographiques[2].

Selon le moine franciscain espagnol du XVe siècle Alfonso de Spina, (Alonso ou Alfonso, Alphonso, Spina ou Espina), (mort vers 1491) le miracle des Billettes serait à l’origine de l’expulsion de 1306. Cette interprétation est contredite par les affirmations des historiens qui attribuent cette expulsion à des besoins financiers pour permettre à Philippe le Bel le rétablissement de la bonne monnaie après les dévaluations dues au financement des guerres. À l'opposé, Jacques de Thérines (mort en 1321), dans Quodlibet I, 14 se sert de l'exemple du miracle des Billettes pour justifier la présence des juifs parmi les chrétiens car, quand ils portent atteinte au Christ, les miracles comme « l’exemple de l’eucharistie à Saint-Jean-en-Grève » permettait de renforcer la foi des chrétiens[4].

De grandes processions ont lieu avec les reliques du miracle (hostie ou le canif qui l'aurait percée) ont lieu, notamment en 1412 (40 000 personnes), 1415, 1418, 1444 (9 000 ou 10 000 personnes), 1534, 1538[1].

En souvenir du miracle, la rue des Jardins prit au XVe siècle le nom de « rue où Dieu-fut-Bouilli »[5].

Représentations

[modifier | modifier le code]

La fenêtre vitrail de l'Église Saint-Étienne-du-Mont

[modifier | modifier le code]
Fenêtre vitrail du miracle des Billettes dans la Chapelle des Cathéchismes de l'église Saint-Étienne-du-Mont de Paris

La fenêtre, située dans la Chapelle des Catéchismes, a été élaborée dans le premier quart du XVIIe siècle. La fenêtre en plein cintre se compose de deux scènes qui à l'origine n'étaient pas juxtaposées. La scène de la Crucifixion au milieu et au-dessus celle du Christ, présentant une hostie, appartenaient à deux fenêtres différentes qui se trouvaient dans la chapelle Sainte Geneviève de l'église de Saint-Étienne-du-Mont.

Tableau Le Miracle de l'hostie profanée

[modifier | modifier le code]

Le Miracle de l'hostie profanée, une prédelle en six panneaux peinte par Paolo Uccello entre 1467 et 1469, évoque également le miracle des Billettes[1],[6].

Références

[modifier | modifier le code]
  1. a b c d e f g h et i Camille Salatko Petryszcze, « Le Mistere de la Saincte Hostie : introduction, édition du texte et notes par Camille Salatko Petryszcze » [archive du ], sur Université Rennes 2, (consulté le )
  2. a b c d e et f Martignoni 2008, paragraphe 9.
  3. Elsa Marmursztejn, « Du récit exemplaire au casus universitaire : une variation théologique sur le thème de la profanation d'hosties par les juifs (1290) », Médiévales, vol. 20, no 41,‎ , note 6 p. 38 (DOI 10.3406/medi.2001.1524, lire en ligne, consulté le )
  4. Elsa Marmursztejn, « Débats médiévaux sur l’expulsion des juifs des monarchies occidentales », dans Les expulsions de minorités religieuses dans l’Europe des XIIIe-XVIIe siècles (colloque à l'université de Créteil en 2010), Université de Créteil, (lire en ligne), p. 19-44
  5. Félix et Louis Lazare, Dictionnaire administratif et historique des rues de Paris et de ses monuments, Paris, 1844, p.75
  6. Schefer 2007, p. 11.

Sur les autres projets Wikimedia :

Bibliographie complémentaire

[modifier | modifier le code]
  • (la + fr) Dom Martin Bouquet et (sous la direction de) de Wailly et Léopold Delisle, « De miraculo hostiæ a judæo parisiis anno domini M.CC.XC multis ignominiis affectæ », dans Recueil des historiens des Gaules et de la France, t. 22, Paris, Victor Palmé éditeur, , Nouvelle éd. (lire en ligne), p. 32-33
  • Dom Martin Bouquet (dir.), « Extrait d'une chronique anonyme finissant en 1380 », dans Recueil des historiens des Gaules et de la France, t. 21, Paris, Imprimerie nationale, , Nouvelle éd. (lire en ligne), p. 132-133
  • Gérard Dahan, « Il y a sept cents ans à Paris (1290) : l’affaire des Billettes », Communauté nouvelle, no 58,‎ , p. 72-83
  • Elsa Marmursztejn, « Du récit exemplaire au casus universitaire : une variation théologique sur le thème de la profanation d'hosties par les juifs (1290) », Médiévales, no 41,‎ , p. 37-64 (lire en ligne)
  • Élisabeth Pillet : Le vitrail à Paris au XIXe siècle. Entretenir, conserver, restaurer, (Corpus Vitrearum France - Études IX) Presses Universitaires de Rennes, Rennes 2010, (ISBN 978-2-7535-0945-0)
  • (it) Giovanni Villani, « CXLIII-D'uno grande miracolo ch'avenne in Parigi del corpo di Cristo », dans Nuovo Cronica, Parme, Editori Guanda, coll. « Letteratura italiana Einaudi », (lire en ligne), p. 511

Articles connexes

[modifier | modifier le code]